Mettre la nature au cœur des affaires et de la finance

Par Madeline Craig, Analyste de programme, Nature for Development, PNUD, & Malika Bhandarka, Conseillere en innovation, Nature for Development, PNUDr

24 septembre 2020


La nature soutient notre économie mondiale à hauteur de 125 000 milliards de dollars, soit l'équivalent d'une fois et demie le PIB mondial, en fournissant, entre autres, de l'eau potable, de la nourriture, de la sécurité, de la santé, des mesures d'atténuation du climat, des emplois et des moyens de subsistance. Pourtant, au cours des 50 dernières années, nous avons perdu 68% des populations d'animaux sauvages, une perte qui met en péril la moitié du PIB mondial (en anglais).

Investir dans la protection et la restauration de la nature présente de nombreux avantages. Des entreprises qui donnent la priorité à la nature pourraient débloquer 10,1 billions de dollars d'opportunités financières (PDF) et créer 395 millions d'emplois d'ici 2030. L'investissement dans des plans de relance COVID-19 adaptés à la nature et au climat peut générer un retour sur investissement compris entre 2 pour 1 et 10 pour 1.

Le PNUD, avec 40 autres partenaires, organise un « Nature for Life Hub » virtuel pour explorer comment placer la nature au cœur du développement durable, y compris les entreprises et les finances. Lors de la Journée des affaires et de la finance du 25 septembre 2020, qui fait partie de la série mondiale virtuelle « Finance for Nature » dirigée par le PNUD, des champions du secteur privé partageront leurs idées sur des stratégies commerciales et d'investissement favorables à la nature. Les sessions se concentrent sur quatre transformations clés qui doivent avoir lieu dans le monde des affaires et de la finance si nous voulons arrêter et inverser la perte de biodiversité.

Les PDG placent la nature au cœur de l'entreprise

Les PDG du monde de l'alimentation, de la finance et des infrastructures ont commencé à faire preuve d'élan et d'ambition pour protéger la nature. De nouvelles initiatives, telles que l'engagement en faveur du financement de la biodiversité (en anglais) et l'appel à l'action « La nature est l'affaire de tous » (en anglais), montrent ce que les entreprises peuvent réaliser grâce à l'action collective, la volonté politique et la responsabilité. Grâce à ces initiatives, des visionnaires de Walmart, Natura, ASN Bank, HSBC Asset Management, BRK Ambiental et du Forum économique mondial démontrent que le fait de donner la priorité à la nature créera une opportunité de marché de 10,1 billions de dollars.

Transformer le financement pour la nature par la transparence et la responsabilité

Selon le rapport sur les risques mondiaux du Forum économique mondial (pdf en anglais), les cinq principaux risques économiques identifiés par les PDG sont liés à l'environnement et au changement climatique – qui ont tous des répercussions importantes sur les coûts opérationnels, la réputation et la rentabilité d'une entreprise. Une étape clé pour transformer la finance au service de la nature sera d'accroître la transparence et la responsabilité : c'est ce qu'a étudié le professeur Dasgupta en étudiant l'économie de la biodiversité, avec le gouvernement français, AXA, Danone, Refinitiv, la Commission nationale des banques et des valeurs mobilières du Mexique (CNBV), le Rainforest Action Network, Global Canopy, le PNUE, le WWF et le PNUD . Un nouveau groupe de travail (en anglais) – le groupe de travail informel de la task-force sur la divulgation financière liée à la nature (IWG TNFD) – sera lancé pour orienter la finance vers des résultats positifs pour la nature.

Renforcer les lois et les cadres juridiques

Lorsque la biodiversité est perdue ou dégradée, les communautés en souffrent. Si nous voulons créer un réseau de sécurité planétaire basé sur la nature, nous devons établir plus clairement les liens entre la nature et les droits de l'Homme. La crise COVID-19 a démontré que l'exploitation négligente de la biodiversité pose des risques profonds, affectant des milliards de personnes, en particulier les pauvres et les vulnérables. Dans les « Règles de la nature : Un nouvel accord avec la nature » du centre Nature for Life, des organisations clés, dont le WBCSD, l'OCDE, le Réseau de contentieux, BirdLife International, la Banque africaine de développement, les principaux dirigeants des Nations unies en matière de droits de l'Homme et les chefs d'État, expliquent clairement pourquoi la nature et les droits de l’Homme sont indissociables, et montrent comment les dirigeants de tous les secteurs et gouvernements peuvent donner la priorité à leur protection.

Combler le « missing middle » dans le financement de la nature

Les petites et moyennes entreprises représentent 6% des emplois et jusqu'à 40% du PIB dans les marchés émergents, où les marchés de consommation devraient valoir 30 000 milliards de dollars d'ici 2025 (lien vers article en anglais). Les entreprises vertes sont prêtes à jouer un rôle de premier plan pour favoriser la croissance économique, l'innovation et le développement écologiques, et pour catalyser une reprise verte à partir de COVID-19. La mauvaise nouvelle, c'est que les petites entreprises ont souvent du mal à mobiliser les investissements nécessaires pour développer leurs activités et accroître leur impact – en particulier pour les entreprises axées sur la nature qui recherchent des capitaux d'investissement de l'ordre de 1 à 10 millions de dollars. Ce « missing-middle » est trop grand pour les approches traditionnelles de la microfinance, mais trop petit pour attirer la plupart des grands investisseurs institutionnels. La bonne nouvelle est que BNP Paribas, Forest First Colombia, le Green Fund, Kering, ANDE et UK DEFRA font des progrès dans l'exploration de ce qu'il faut pour financer le « missing middle » vert.

La pandémie COVID-19 est le test de stress ultime des systèmes locaux, nationaux et mondiaux. C'est aussi une occasion sans précédent de régénérer des économies vertes, inclusives et circulaires, et de faire en sorte que la croissance se fasse dans les limites de notre planète. Il est clair que de nombreuses entreprises et institutions financières se sont déjà engagées dans cette voie. Nous vous invitons à les rejoindre en demandant aux directeurs de votre banque, de votre fonds de retraite et de vos entreprises préférées : « Que faites-vous pour 'verdir votre protefeuille' (#GreenYourWallet) ? »