Entre modernité et tradition : l’approche COVID19 de l'Algérie

9 juin 2020


COVID-19 a apparemment réécrit les règles dans les sphères d'influence sociales, économiques, politiques et environnementales. Aucun pays ou région n'a été épargné par les effets de la pandémie. En Algérie, comme ailleurs, bon nombre des retombées secondaires et même tertiaires de la crise commencent à peine à être vraiment saisies.  

C’est dans ce contexte qu’entre en jeu notre réseau d’Accelerator Labs, des laboratoires d’innovation recherchant et soutenant des solutions locales répondant aux besoins des communautés. Combinées au réservoir de connaissances de notre réseau mondial ainsi qu’à notre expérience dans le développement, ces solutions sont mises en avant pour contribuer à une société plus équitable et un avenir plus durable.

En Algérie, la vie sociale est surtout basée sur l’argent liquide. À l'exception des assurances voyage, des recharges de crédit téléphonique ou du paiements des factures à distance, nous n'utilisons pas beaucoup le paiement électronique. Pour s'adapter au marché, les services de covoiturage, de livraison ou encore les commerçants des marchés acceptent l'argent comptant.  

Pour Zaki Allal, médecin et entrepreneur algérien, le e-commerce reste face « à des défis techniques, des charges juridiques, fiscales et réglementaires. » Heureusement, « cela n'empêche pas les jeunes entrepreneurs d'être des innovateurs frugaux et d'utiliser l'argent comptant comme une alternative au paiement électronique. »

 

La résilience des structures traditionnelles face à la crise

Les changements qui s’imposent « post-coronavirus » ne se limitent pas seulement aux réponses numériques. Dans le village de Tifilkout, à 162 km d'Alger, les habitants se sont placés volontairement en confinement pour empêcher la propagation du virus et protéger leur communauté. Une unité de crise, appelée « COVID-19 Tifilkout », et dirigée par la société civile et la Tajmaat – l'assemblée ancestrale du village – a été formée pour préparer et gérer l'isolement.

Pour Amel Mohandi, journaliste originaire du village, la tradition ancestrale d'un comité des sages a joué un rôle clé dans la réponse rapide à la pandémie. L'unité de crise a ainsi préparé le confinement avec les vivres nécessaires, organisé une campagne de sensibilisation, et placé des distributeurs de savon près de chaque fontaine à eau; tandis qu'un groupe de volontaires à chaque point d'accès du village désinfectait les véhicules venant de l'extérieur. Tifilkout possède également une unité sanitaire et une ambulance, offerte par la diaspora du village.  

Pour contrer une éventuelle propagation du virus, la cellule de crise a sollicité les tailleurs locaux pour la fabrication de masques en tissu. Et enfin, pour limiter les mouvements de personnes et assurer la distanciation sociale, un groupe de bénévoles s’occupait des livraisons de vivres et des services aux habitants.

Toutes les initiatives n'ont pas été bien accueillies. Les mesures de protection interdisant aussi toute cérémonie funéraire, convaincre les résidents de ne pas assister aux funérailles d'une aînée décédée de causes naturelles a été un véritable défi pour la cellule de crise, étant donné le fort esprit de solidarité communautaire du village.

Jusqu’à présent, aucun cas de coronavirus n’a été enregistré à Tifilkout, ce qui souligne le succès d’une structure communautaire résiliente fournissant des mesures de protection sociales au-delà du gouvernement.

Tifilkout n’est qu’un exemple parmi d’autres. En ce qui concerne COVID-19, nous assistons à des changements sans précédent en Algérie et au-delà, et en apprenons tous les jours plus sur les besoins et les défis que pose cette crise sur le long terme.  Il est donc important de continuer à cartographier et à soutenir ces solutions contribuant à protéger les gagne-pains et les cultures.